Trans Internet-Zeitschrift für Kulturwissenschaften 16. Nr. April 2006
 

7.1. Media systems: their evolution and innovation
Herausgeber | Editors | Éditeur: Ernest W. B. Hess-Lüttich (Bern)

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Quelques remarques sur l'écologie culturelle de la technologie mobile

Kim Sung-Do (Korea University)

 

Dans cette communication, j'aimerais fournir tout d'abord des éléments de base des réflexions épistémologiques en général sur les effets socio-culturels de la téléphonie mobile. Dans ce cadre, je tenterai de présenter un nouveau paysage de la vie sociale et individuelle; provoqué par cette nouvelle technologie de communication en construisant une problématique sémiotique (au sens large, c'est-à-dire comme une science de la culture) des nouveaux phénomènes rituels, langagiers et emotionels. En un mot, un nouveau style de vie sera evoqué en suggérant la révolution culturelle de la vie mobile (en anglais the Mobile Life). Nous vivons dans un âge des machines intelligentes qui sont dans un processus perpétuel de la communication créant les noveaux tissus des connnaissances, des informations et des pouvoirs à travers les sociétés globale et locale. Le téléphone mobile constitute cette technologie intelligente par excellence. 

Dans un deuxième temps, je me focaliserai sur un phénomène très essentiel, me paraît-il, de la pénération de la technologie dans le corps humain. Cette convivialité de la technologie mobile et du corps signifie que la technologie devient une partie de notre corps. Dans ce contexte, j'aimerais évoquer justement quelques nouvelles tendances du corps de la machine mobile, qui s'adaptent à cette intimité (ou intimisation, si j'ose dire) des deux corps de genres différents. Pour la justification de cette thèse, les preuves de l'ethnographie du média seront données. Cette hybridation du corps et de la machine reflète un effet du rehaussement de l'aspect technologique du corps qui rend de plus en plus délicate la séparation du naturel et de l'artificiel. Cette symbiose de la vie humaine et non-humaine est un symbole de la nouvelle structure des rapports sociaux.    

 

I. Remarques préliminaires

Depuis quelques années les médias mobiles - surtout les téléphones portables - ont connu une évolution fulgurante en dépassant les volumes des autres médias: le nombre actuel des usagers vient d'atteindre deux milliards à la fin de l'année 2005. Cette technologie mobile est devenue une quintessence de la révolution numérique en transformant les modes du travail, du jeu et de la communication. On a réalisé la communication permanente en créant une nouvelle architecture du savoir et de l'information grâce à cette modalité technologique inédite. Mais, ce qui existe au coeur de toutes les évolutions technologiques ne relève pas simplement d'une dimension technique mais de l'expérience humaine et de la signification culturelle. C’ est donc une tâche urgente d'effectuer une investigation approfondie sur les implications culturelles de la révolution mobile pour les sciences culturelles. Les téléphones portables transforment effectivement la nature de la communication et affectent radicalement l'identité individuelle et les rapports sociaux. Ainsi, ils projettent une image de l'auto-comportement et parfois justifient la solitude même: ‘je ne suis pas tout seul, je suis avec mon téléphone portable.’

En somme, les technologies mobiles constituent une nouvelle écologie culturelle des média à travers leurs messages sociaux, leurs expositions publiques et leur mode (fashion) ; il faut saisir les processus existentiels sur le plan de la psychologie au-delà d’une simple interprétation fonctionnelle vis-à-vis d'elles. Les média mobiles sont étroitement liés à la perception de l'individu, au comportement et à l'organisation sociale qui recouvrent les questions de la distance, du pouvoir, du statut et de l'identité sociaux.

Après avoir saisi des dimensions socioculturelles inscrites dans cet objet, je tenterai de faire quelques observations sur la nature des nouveaux rapports entre le corps humain et cet objet mobile. Cette convivialité de la technologie mobile et du corps humain signifie que la technologie devient une partie de notre corps. Il convient donc d'observer cet objet autant d'un point de vue de la gestualité inscrite en lui-même, que de son design et de son ergonomie. Une autre remarque sur la limite de ce travail doit être soulignée : les technologies mobiles é voluent à une vitesse telle qu’il est tr è s difficile de se maintenir à la pointe du progr è s. Il n’est m ê me pas é vident de pouvoir, plus simplement, se tenir au courant des derni è res nouveaut é s.

 

II. Les aspects culturels des téléphones portables

1. Les traits médiatiques

J'aimerais d'abord évoquer quelques traits de cet objet d'un point de vue des propriétés médiatiques. Je me permets de les énumérer très brièvement: 1) immédiateté qui implique le contact immédiat accompagné par l'interaction des voix humaines ; 2) la possibilité d’atteindre partout qui rend la communication possible en dépassant les limites du temps et de l'espace ; 3) la mobilité qui est le plus pertinent trait par rapport aux autres médias. Cette caractéristique représente un courant culturel du nomadisme caractéristique de la société postmoderne ; 4) la portabilité ; 5) la possibilité de s'en vêtir (wearability) ; 6) la possibilité de garder à la main (handiness) ;7) la multimédialité (le syncrétisme médiatique) attestée dans une convergence des différentes fonctions du SMS à la t é l é vision mobile via la caméra numérique ; 8) l'individualité qui renforce l'individualisme et la privatisation du comportement humain

Je ne parlerai pas de ces aspects en détail mais j'aimerais simplement dire quelques mots sur les phénomènes saillants de cette nouvelle technologie. En premier lieu, il convient de souligner une tension entre l'accessibilité en général et l'assymétrie en réalité dans les pratiques concrètes de la communication. Les pratiques communicationnelles des téléphones portables sont assez similaires à la guerre de la guérilla. Il est difficile de découvrir une cohérence dans l‘attente et les pratiques des usagers des portables. Les enquêtes récentes montrent une auto-contradiction. On constate simultanément un désir de l'omnipotence de la performance de cet objet magique et un refus de l'accessibilité réciproque par un numéro secret et par la canalisation. Cette évolution de l'usage stratégique a produit une croissance des rapports de la communication assymétrique dans un contexte autant privé que professionnel. En deuxième lieu, on découvre une logique du contact permanent qui correspond à la logique sociale de la technologie de la communication. Cette image forte du contact permanent est une image de la communication pure: elle reflète et idéalise un désir de partager l'esprit de l'autre. (1)

La communication pure est une image incarnée de cette logique du contact permanent. En troisième lieu, nous constatons une fétichisation. L'individualisation du téléphone a pour fonction primaire de posséder un rapport syncrétique au lieu de l'interaction. Les portables considérés plutôt comme un objet-fétiche qu'un média fonctionnel satisfont toutes les fantaisies du pouvoir et la possession exclusive des proches. Une autre caractéristique, tout aussi fondamentale, qui est le processus de gadgetisation peut être mieux comprise dans ce contexte. En effet, dans les pratiques concrètes, un téléphone portable produit un sillon d'accessoires. Un tel caractère reflète la tendence du schizofonctionnel du 'ça peut toujours servir'.

En quatrième lieu, on peut interpréter la mutimédialité des portables comme un processus de la remédiation qui est défini comme un syncrétisme sémiotiques des figures existantes et comme une convergence rhétorique. En cinquième et dernier lieu, les portables peuvent être définis comme une icône culturelle du nomadisme.

 

2. Les traits culturels

2-1. Le téléphone portable comme objet symbolique et comme constructeur de l'identité personnelle

Pour la jeune génération, les portables ne sont pas simplement un objet pragmatique permettant la communication mais un objet investi de sens symbolique et joue un rôle essentiel dans la constitution d'une personnalité. Dans une perspective démographique, les portables pénétrent le plus dans l'adolescence. Les serveurs et les producteurs ont compris cette tendance et cela se constate dans la tonalité de la communication publicitaire depuis quelques années. Dans la plupart des cas, dans une gamme de critères du choix d'une marque, le facteur déterminant est l'identité ou l'image proposée, non pas une fonctionnalité ou une qualité, excepté le prix. La jeunesse, le sport, l'artiste du rap sont souvent associés au style de chaque marque du portable.

2-2. Le portable comme objet de l'égalité des sexes (gender)

En retraçant l'histoire des technologies de la communication et de l'information, il faut noter que le téléphone portable est le premier média qui a réalisé l'attribution égale entre les deux sexes. A cet égard, il est nécessaire de dissocier cette technologie mobile des différentes technologies de la communication: dans l'internet et l'ordinateur, l'usage dominant est masculin. On peut énoncer une hypothèse sur cette attirance des portables vis-à-vis des femmes: en tant que technologie de la communication, le portable s'adapte aux valeurs sociales préférées par les femmes: préférence pour le sens de l'ou ï e et la convivialité. Mais plus concrètement, dans un contexte social, l'achat des portables parmi les jeunes filles s'effectue avec la permission de leurs parents en vue de fournir une autonomie protégée.

2-3. Le réseau des téléphones portables comme loci de l'appartenance tribale

Pour les jeunes, la motivation majeure de choisir le réseau des téléphones mobiles est l'image au lieu du prix. Ce réseau mobile a une connotation bien connue. Les groupes de la nouvelle appartenance sociale se créent très rapidement et on se rend compte du fait que chaque réseau connaît les rituels et les codes d'usages particuliers. Les jeunes adolescents tentent ainsi de construire leur tribu sociale qui partage des valeurs ou des références particulières. L'objet de ce réseau consiste à établir la connection entre ses membres tribaux et l'identité tribale. Cette fragmentation peut être considérée comme une réaction postmoderne.

2.4. L'existence sur le réseau (Networking Life)

Pour la majorité des gens interrogés, la simple possibilité d'être atteint partout est la motivation sociale le plus importante dans l'adoption du téléphone portable. Derrière cette motivation, deux phénomènes sociologiques importants méritent une étude approfondie. Le premier concerne l'existence sociale des jeunes dans leur tribu ou leur réseau. Pour exister socialement sur un réseau, on doit avant tout être cherché, c'est-à-dire appelé. Les appels reçus sont vus par les jeunes non comme des signes fonctionnels - 'je communique beaucoup' - mais comme des signes symboliques ou existentiels - 'je suis quelqu'un dans la tribu'. L'impression générale que l'on puisse en avoir se résume ainsi: l'acte de transmettre et de recevoir des messages a la même importance que les messages mêmes.

2.5. L'hybridation du corps humain et de la machine: l'impénétration du téléphone portable dans le corps

Dans les pays hautement industrialisés on est en train d‘entrer dans une troisième phase distinguée par le fait que les êtres humains font des investissements technologiques dans le corps humain. L'effet apparent est une nouvelle valorisation de l'aspect technologique du corps humain. Cette symbiose entre l'individu et la machine qui fait éprouver une vie humaine et non-humaine est un symbole de la nouvelle structure des rapports sociaux. La technologie qui pénétre dans nos corps sauve nos vies et protège notre santé, élargit le champ de nos moyens de communication.

2.6. La stylisation esthétique du design des portables: des portables comme expression esthétique et culturelle

Il est nécessaire de faire une étude sur l'esthétique du design des portables du point de vue de l'origine commerciale et de la consommation publique. Dans ce contexte, il faut surtout faire attention au processus de l'assimilation entre la mode et le portable en soulignant les dimensions expressives et symboliques des technologies du corps.

2.7. Le solipsime du média

Dans des circonstances diverses, le téléphone mobile justifie la solitude des jeunes qui utilisent leurs mobiles parce qu’ils restent tout seuls et surtout quand ils se sentent mal à l’aise avec les autres personnes dans un lieu public: ‘je ne suis pas tout seul, mais je suis très bien avc mon protable’

 

III. La gestualité, le design, et la valorisation: une approche sémiotique des téléphones portables comme objet magique

1. La micro-gestualité du portable

Selon le grand philosophe allemand du média, V.Flussser, chaque média possède son langage gestuel unique: le geste de photographier, le geste de filmer, le geste de peindre, etc. Il est donc justifiable de poser la question suivante: quels sont les traits des gestes des téléphones portables ?

La gestualité liée au portable est une question capitale dans le cadre du rapport entre une machine et un corps. Dans les publicités on peut repérer des gestes très variés représentés explicitement ou implicitement: le portable pendu à la ceinture de la fille qui peint les murs de sa maison, un jeune garçon embrassant une jeune fille fait une lumière du portable. Les communications publicitaires ont tendance de souligner la facilité d'utilisation des modèles nouveaux en focalisant le geste de la touche. Il n'est pas rare de montrer un geste de donner un petit coup avec une seule main en fermant le petit volet sur la paume d'une main. Un tel geste fait partie de l'hyperbole de la gestualité du portable. Les gestes sont réduits au minimalisme.(2) L'exagération rhétorique du petit volet est donc plus significative, désormais seul élément mobile en opposition à la réduction des autres gestes. De surcroît, ces gestes peuvent s’articuler en catégories de type ergonomique et sensuel et concernent des traits de type 'doux' et continu: plus de poli et de rondeur des surfaces pour s'adapter à la manipulation de la main. Il s'agit, par exemple, d'un déplacement très léger des doigts ou d'un seul doigt, qui effleure les touches. Mais dans une publicité récente coréenne, une jeune fille portant des écouteurs touche le bouton de l'écouteur sur les oreilles avec son épaule sans utiliser la main. Il est donc raisonnable d'énoncer que la catégorie fondamentale du point de vue gestuel est celle du continu/discontinu. Cette catégorie est valable pour tous les niveaux de construction discursive du portable. Elle se traduit à chaque plan de la construction sémiotique de l'objet portable. Il n'est pas rationnel d'attribuer au seul niveau instrumental ou pratique certains gestes , par exemple le geste d'une seule touche, puisqu'elle est simultanément due à la valorisation de type esthétique ou du type mythique ou du type ludique. En général, les catégories ergonomiques sont liées un peu à chacun des trois types de systèmes. Si ces différents systèmes de valorisation sont dans un premier moment décomposables, ils tendent à se dissoudre les uns dans les autres. Nous avons donc besoin d'autres tentatives de catégorisation. A cet égard, nous avons examiné comment les composantes de type ergonomique concernant en particulier la perception de prise, de toucher montraient une supériorité de ce trait du continu. Il serait intéressant de trouver des catégories pertinentes dans les différents composants du système des valeurs plastiques. A titre d'exemple, on pourrait relever des systèmes sémiotiques pour lesquels l'opposition curviligne/rectiligne peut exprimer l'opposition naturel/artficiel ou entre sensoriel/fonctionnel. Dans le cas du téléphone portable, on peut énoncer une autre hypothèse selon laquelle il y a de véritables processus de convergence de valorisations opposées. Il s'agit des fusions de valeurs produites par les pratiques inscrites dans les portables mêmes. Autrement dit, l'utilisateur du portable serait porté à faire coïncider la fonctionnalité avec la sensorialité, le naturel d'une ligne courbe avec l'artificialité du moyen technologique. On peut remarquer que l'opposition concave/convexe représente effectivement la catégorie ergonomique par excellence, à savoir qu'il existe une réciprocité entre geste et empreinte. La main humaine est prête à recevoir dans sa concavité l'objet convexe.

Il faut être sensible au fait qu'il y a toujours des transformations des processus qui modularisent ces systèmes de valeurs. Il s'agit donc d'indiquer comment de telles valeurs se rendent dynamiques, se composent en séquences d‘action plus ou moins prévues par les portables à l'intérieur des programmes d'usage et narratifs. Il se crée entre sujet et objet des relations d'enveloppement et, ensuite, des processus continus sucessivement fluidifiés dans la gestualité prévue par l'objet. On retrouve un rapport entre main et outil selon le dicton de Leroi-Gourhan. Du point de vue narratif, de telles relations peuvent se configurer comme un faire, qui est forcé à ne-pas-pouvoir-ne-pas-faire. La main suit la forme donnée du portable, qu,i à son tour, est l’empreinte construite à partir d'un modèle mémorisé d'une gestualité préordonnée: un ne-pas-pouvoir-ne-pas-faire qui naît d'un faire virtualisé.

 

2. Le corps humain et la technologie: se revêtir de la communication

Nous avons examiné comment les technologies personnelles comme la téléphonie mobile liées à la communication interpersonnelle sont assimilées à la vie culturelle et au corps de l'utilisateur. Nous avons envisagé de montrer comment les gens utilisent ces technologies en vue d'élargir leur capacité de communiquer et représenter leur image personnelle. Ainsi les technologies deviennent des extensions et représentions des sujets de communiquer. Sous un autre angle, il s'agit d'une analyse des modes par lequels ces technologies deviennent physiquement intégrées aux habits et au corps même. Il faudra examiner ces aspects de la mode et des usages de revêtir ces technologies. Il convient de saisir la confluence de ces éléments comme un moyen d‘élargir les capacités de la communication humaine en termes physique et symbolique et comme sujet de la communication interpersonnelle.

Le protagoniste réel - le vrai sujet et objet - dans la révolution technologique du XXIème siècle dans le champ de la communication est le corps humain. Il est devenu une entité fluctuante et hybride. Il n'est pas une monade non plus à la recherche d'une place, du mot, ou d'un geste mais un terminal qui n'est jamais éteint ni coupé. Le corps humain est doté de la communication, non pas par le choix subjectif, mais comme résultat d'une condition objective: son statut dans un monde où les formes sociales de la reproduction elle-mêmes (production, échange, consommation) ont été absorbées dans les systèmes de communication. Le concept de communication ne se réfère pas seulement au transfert de l'information du destinateur au destinataire. Les théories de la communication basées sur la notion du signe ont montré que la communication s'engage dans un processus de l'interprétation. Les messages sont réciproques. Les signes qui sont produits, échangés et consommés impliquent des modifications dans les identités sociales, les niveaux de la connotation, la fabrique des mythes et la conscience de la méta-communication.

La communication se plante dans le corps dans lequel elle agit tant comme un transformateur qu'un transformé. Le corps permet un médium de la communication de se démettre l‘épaule et de se fluctuer.(3).

De nos jours notre corps porte non seulment les habits et les objets mais des téléphones portables, les Walkmans, GPS, etc. Le communicateur le plus avancé peut heureusement coexister avec l'habit le plus traditionnel. Nous portons les deux et ils construisent l'espace de notre corps comme un espace ouvert à la communication totale.

En effet, les habits avaient toujours un rôle de la communication. Par la mode, nous voulons dire, selon Barthes, un langage non verbal articulé dans un système des constumes traditionnels comme phénomène social et un processus de s‘habiller comme une affaire du choix de l'individu. De nos jours, la mode est un médium de la communication de masse créée par l'interaction entre ces deux concepts. Le corps habillé est une unité structurale de la communication sociale, d'autant qu'il est totalement communicable comme une interface de l'ordinateur. La communication expose le corps pour prendre contact avec les autres et élargit ses frontières. Les technologies de l'information de la communication (TIC) ont fourni les nouvelles possibilités du corps à savoir qu'elles ont introduit non seulement les nouveaux médias de l'information mais pensent, programment et guident la communication elle-même. Elles produisent des valeurs, simulent les fonctions corporelles et renforcent les fonctions organiques.

Le cyborg, une invention de la fiction narrative et du cinéma dans les années '80 illustre bien le triomphe des accrétions organiques et non-organiques au corps et l'influence de la machine dans la vie. Le cyborg a des implications grotesques, les traits saillants, de vider et d'ouvrir le corps, une inversion du sens et une méta-stabilité du corps comme une déception perceptuelle et cognitive.

Le corps pense sa propre image en termes des catégories spatiales qui le définissent: haut/bas, droit/gauche, près/loin. La dimension du cyborg a appelé un réexamen de la catégorie; près/loin, puisque les nouvelles TIC ont démoli la distance et érigé à sa place une proximité virtuelle et sémiotique qui est universelle. C'est la même chose pour les relations temporelles. Le courriel, les téléphones mobiles, etc sont des formes de la communication de la simultanéité et de la proximité que ces média fournissent, ils affectent et définissent la qualité du message lui-même. La proximité des corps peut être purement métaphorique et virtuelle mais la vitesse est actuelle.

Par conséquent, la relation avec l'espace semble être une nouvelle frontière pour la corporéité, quand elle est considérée en termes de nouvelles TIC et des façons par lesquelles elles peuvent être littéralement impénétrées dans le corps. Le corps s'habille de la communication. Ces changements dans notre perception des dimensions spatiale et temporelle posent un certain nombre des problèmes à l'égard des relations entre le sujet et l'espace. Le nomade, le surfer, quelques métaphores théorico-philosophiques employées pour décrire l'individu postmoderne immergé dans le monde des nouveaux médias sont extraits des réels de l'espace, du passage, et du mouvement. Cet imaginaire encadre la condition des sujets sociaux dans notre âge avec toutes les incertitudes. Or, ces mêmes sujets sont profondément enracinés dans la complexité du présent, existant sur une dimension globale et celle des tensions locales, où la position spatiale du corps, c'est-à-dire sa mise au point par rapport au monde tient une importance particulière.

Ces choses dites peuvent être des métaphores de l'incertain mais elles sont également profondément liées aux expériences quotidiennes et aux cultures de notre âge. Le prototype du modèle théorique pour ces sujets serait sans doute le flâneur que Benjamin a considéré comme l'incarnation du métropolis: une figure de la mode et de l'espace, personnalisant la dialectique entre les espaces ouvert et fermé exprimés par la ville.

Il y a une autre image des citoyens dans la description de la culture japonaise de Barthes qui exprime l'idée du passage et du voyage comme personnifiés par les objets recouvrant le corps. Barthes suggère ici le fait que les objets couvrant le corps n'ont pas seulment une fonction utilitaire mais sont investis de la valeur mythique qui extrait ses forces des récits racontés par ces objets.

Le voyage est donc inséparable de sa narration. Le vénérable Walkman et le nouveau MP3 joueur marquent les chants du voyageur métropolitain. Les costumes traditionnels prennent de nouvelles fonctions.

Le nomadisme, la navigation sur ligne et des autres aspects qui sont soulignés par des théoriciens pendant la dernière décennnie ne peuvent pas être séparés de l'idée du foyer: commodités personalisées, la tranquilité personalisée, la créativité hospitable comme dans l'expression de home page. Le foyer peut être mobile, comportant toutes les choses que nous portons avec nous quand nous voyageons comme un office dans la notebook. Aussi, home signifie que nous sommes entourés de l'environnement amical avec des objets familiers et personnels. Les porteurs de téléphones mobiles fabriqués sur commande, tissu qui régule notre température corporelle, habits qui transforment nos mouvements en une source d'énergie, objets qui nous gardent dans un contact plurisensoriel avec des autres gens, de près ou de loin. Il ne s'agit pas du cas où le corps est devenu non-organique comme dans une image du cyborg, mais plutôt du cas où les choses pensent - les objets sont devnus humanisés en vue de communiquer avec nous.

La cyberculture est actuellement un lieu commun et la communication totale est un besoin physiologique. Par la suite, l'intégration du corps de la machine est familière à tout le monde. S'habiller de la communication et la mettre dans le corps signifient dans un certain sens son apprivoisement. Aussi, notre corps est ce qui nous rend unique et détermine notre identité.

Alors pourquoi cet investissement technologique dans le corps ?

Le seul terrain où la politique sociale peut gagner un fodement concernant les valeurs de la reproduction et de la communication est l'hybridation technologique du corps. Le corps est un noyau formel lié aux sphères du travail domestique. Le corps n'est pas seulement un produit de la sphère domestique mais aussi la condition de l'existence du système productif. En tant que produit de la force naturelle du travail social dans la sphère domestique, le corps humain n'a pas de valeur en lui-même pour ces moments. Il a une valeur dans la mesure où il est un récipient de sa capacité de travailler. Le plus les technologies se pénétrent dans le corps, le plus elles délimitent la quantité du travail de vivre nécessaire pour la production du corps lui-même et sa capacité de travailler. Depuis quelques décennies, le corps dans le monde postmoderne a été utilisé plutôt comme le producteur de l'énergie immatérielle et de la communication que celui de l'énergie physique et matérielle. Il est évident que les machines du cerveau avec la mécanisation du corps sont les technologies typiques de l'ère postmoderne. Mais le cyborg resterait une pauvre caricature si nous ne saisissions pas ses origines avec ses significations diachroniques et politiques. Le processus qui a rendu possible l'hybridation du corps et de la machine relève d'une atténuation des différences sur le plan ontologique. Les modes dans lesquels les êtres humains se confrontent au monde et les relations qu'ils établissent entre le corps et la technologie, entre la technologie et les objets, et entre les objets et le soi sont en train de changer graduellement. Du point de vue anthropologique, l'atténuation de ces différenes peut être condamnée comme une catastrophe anthropologique. Mais en même temps elle exprime une tendence structurelle très forte du système productif et aussi une force d'attraction forte vis-à-vis de l'humanité.

© Kim Sung-Do (Korea University)


NOTES

(1) cf. Katz, J and M. Aakhus, eds. Perpetual Contact: Mobile Communication, Private talk, public Performance. Cambridge and New York: Cambridge University Press. 2002.

(2) Federico Montanari, "Un objet 'néo-magique': le cas des téléphones portables" in: Les objets au quotidien, sous la direction de J. Fontanille & A. Zinna, Pulim, Limoges, 2005, pp. 111-130.

(3) cf. Patrizia Calefato, "Wearing Communication: Home, Travel, Space". in Mediating the Human Body, edited by Leopoldina Fortunati et James E. Katz, Lawrence Erlbaum, London, 163-168


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Ernest W.B. Hess-Lüttich (Bern, Switzerland): Report: Media systems - their evolution and innovation. In: TRANS. Internet-Zeitschrift für Kulturwissenschaften. No. 16/2005. WWW: http://www.inst.at/trans/16Nr/07_1/sung-do16.htm

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