Dr. OULDENNEBIA- ELKEURTI Naima
Université Djillali Liabés- Sidi Bel Abbés
Laboratoire LAFRAMA – Oran 2
Abstract: Students in difficulty in the classroom would be more adept at formulating and expressing themselves when we use their initiatives, when we give them responsibility. Our main concern is to try to provide them with a certain amount of knowledge and know-how that first helps them understand and then communicate based on the interactive and creative side. We will try to awaken in them the need to express themselves by arousing their interest and creating in them the creative impulse.
Key words: creative writing- imagination- poetry- interaction
Résumé: Les élèves en difficulté en classe seraient plus habiles à formuler et à s’exprimer lorsque nous faisant appel à leurs initiatives, lorsque nous leur confions une responsabilité. Notre grande préoccupation, c’est de chercher à les munir d’un certain nombre de savoirs et de savoir-faire qui les aident d’abord à comprendre, puis à communiquer en se basant sur leur coté interactif et créatif. Nous tenterons d’éveiller en eux le besoin de s’exprimer en suscitant leur intérêt et en faisant naitre en eux l’élan créateur.
Mots clés: écriture créative- imagination- poésie- interaction
Nous nous proposons dans la présente intervention, de démontrer aux élèves que l’écriture créative est accessible, mais à condition d’être munis d’outils nécessaires à cette pratique et d’être habitués à un certain nombre de démarches basées sur des activités de découverte d’abord, puis sur des tâches de production finalisée. Nous pensons que pour faciliter l’apprentissage du français et développer la compétence de l’écrit nous devrions développer l’imagination des élèves. Nous choisissons pour cela le poème comme outil pédagogique.
Nous nous bornerons principalement ici à la production de textes poétiques qui donnent l’occasion aux élèves du collège de s’exprimer car la langue est non seulement un outil de communication, mais aussi de pensée et d’expression de sentiments. Nous allons d’abord les aider à noter ensuite rédiger quelque vers reflétant leur état d’âme, ou tout simplement leur petits secrets ; dans une langue autre que leur langue maternelle et ainsi aller vers une progression graduelle de l’autonomie ; comme le précise le pédagogue Vigotski1, celui qui « prend conscience de ce qu’il fait » peut « utiliser volontairement ses propres savoir faire ». L’outil le plus important dans une telle implication, c’est l’expérience constructiviste née de l’interaction sociale, interaction finalisée par une tâche à accomplir. A ce sujet, la lecture du CECR2 nous apprend que la notion de tâche devient l’axe principal sur lesquelles s’appuient les séquences didactiques. Et, « Il y a « tâche » dans la mesure où l’action est le fait d’un (ou de plusieurs) sujet(s) qui y mobilise(nt) stratégiquement les compétences dont il(s) dispose(nt) en vue de parvenir à un résultat déterminé». Selon une perspective cognitive « enseigner une langue ne se limite plus à faire acquérir des automatismes; au contraire, une langue est maintenant perçue comme un processus créateur où la compréhension tient une place essentielle3 ». L’écriture créative qui fait l’objet essentiel de la présente recherche, est donc d’un point de vue psycholinguistique, une activité cognitive complexe. Plusieurs stratégies mentales dont la mémorisation, la planification, l’appel aux pré-requis linguistiques doivent être mobilisées.
Dans l’approche actionnelle les usagers d’une langue sont identifiés comme « acteurs sociaux ayant à accomplir des tâches […] dans des circonstances et un environnement donnés, à l’intérieur d’un domaine d’action particulier » (CECR, p.15).
Selon Goullier ; « il y a tâche que si l’action est motivée par un objectif ou un besoin, personnel ou suscité par la situation d’apprentissage, et si cette action mène à un résultat identifiable4 ». Dans notre expérience, nous essayons d’appliquer cette notion de tâche pour la réalisation d’un projet d’écriture de textes poétiques en classe de français langue étrangère au collège.
La rédaction d’un Haïku nous semble un bel exemple de cette application de par sa nature typographique et son accessibilité (longueur limitée, structures syntaxiques assez simples, pratiques amusantes et motivationnelles, etc.). Pour y parvenir, nous avons confié aux élèves la Tâche principale suivante : Produire des « Haikus ». Sont invité à participer les élèves de quarième année du collège Benjillali Kadda à in El Turck à Oran.
Notre projet est orienté, dès le début de l’expérience vers l’approche actionnelle qui mène à une stratégie innovatrice et à une définition d’un enjeu différent d’enseignement ; celui d’établir des conditions favorisant l’autonomie de l’élève au niveau de son perfectionnement linguistique et extralinguistique. Pour se faire, les participants devront accomplir des tâches ayant des objectifs précis qui les impliquent directement dans l’opération de l’apprentissage. Nous avons commencé par organiser des séances pour l’apprentissage de quelques règles de rédaction poétique. Des explications supplémentaires ont été fournies aux participants par des rencontres individuelles.
Activité 1 : Se servir des cinq sens :
Nous avons proposé une première activité à travers laquelle nous voulions développer l’imagination des élèves. En suscitant le pouvoir de l’imagination cela entraîne les élèves à oser apercevoir réellement et physiquement, une chose. Ainsi pour écrire un poème, les élèves doivent apprendre à se servir de leur cinq sens. Nous avons commencé par leur poser les questions suivantes:
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„Si le bruit était une couleur, ce serait laquelle?“
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„Si le bruit était un fruit ce serait lequel?“
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„Si le silence pouvait se toucher il serait comme quelle matière?
Au fur et à mesure, nous notions sur le tableau les réponses des élèves en incitant ensuite ces derniers à piocher dans le répertoire « de mots écrits » et en les guidant dans leurs associations, il fallait choisir un mot qui évoquait une matière et le joindre à un mot qui évoquait un fruit , ou un mot qui décrivait une matière pour l’associer à un autre qui décrivait une couleur. L’apprentissage de la création poétique est étroitement lié à une éducation sensorielle. Pour imaginer, créer des images, il faut apprendre à se servir de ses sens. les élèves prennent conscience du fait que le ressenti peut se traduire en mots. Ils découvrent le pouvoir de nommer, de s’exprimer par le corps tout entier. La poésie met bien en jeu les compétences suivantes : Dire, Voir, Entendre, Lire. Il paraît évident qu’en disant des poésies, l’enfant prend conscience de l’importance de sa voix, il apprend à la poser, à articuler, à accentuer. « On comprend dès lors que le passage par l’expression poétique puisse s’avérer particulièrement efficace chez des enfants en difficulté avec la langue standard5. Ainsi des activités poétiques qui prennent en compte le langage du corps sont nécessaires. Partir d’événements réels, partir de réalisations pratiques, de la représentation imagée, d’objets pris dans leur contexte d’ensemble, est un sûr moyen d’appeler l’intérêt et l’effort. Cette activité a beaucoup intéressé les élèves ; ce jeu de substitution, a permis aux élèves de faire des comparaisons comme le montre la grille qui suit.
Grille d’analyse :
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Questions
Réponses données sur 30 élèves présents en classe
Interprétations
Si le bruit était une couleur, ce serait laquelle ?
08 élèves répondent : rouge
Les deux couleurs sont perçues comme étant négatives, comme le bruit
22 élèves répondent : noir
Si le bruit était un fruit, ce serait lequel ?
13 élèves répondent : citron
La nuisance est perçue ici comme acide, aigre. Un élève explique qu’en goutant le citron, ou en entendant un bruit cela provoque une sensation désagréable, blessantes.et une grimace du visage
17 élèves ne donnent pas de réponse
Si le silence pouvait se toucher, il serait comme quelle matière ?
08 répondent : soie
Cette comparaison a emporté presque tous dans un univers doux, calme et soyeux. le silence est perçu comme un apaisement et une évasion
02 répondent : herbe
20répondent : coton
Phase de production
Activité 2
Nous incitons l’élève à adopter une posture réflexive6. Il faut se rappeler que l’élève est constamment en rappel de situation d’échec ou de réussite qui est mémorisée. Nous évoquons Alain Sotto lorsqu’il parle d’insécurité méthodologique, l’enfant associe donc dans sa mémoire des images négatives, à savoir ; pas de bonnes notes cela veut dire des parents pas contents. En plus dans la tête de l’élève il y a des images, qui sont des mots ; soit avec des sons ou des sens. Si on ne lui laisse pas le temps de se parler avec soi-même, il aura une image vague, il faut qu’il aille chercher le message et le mémoriser dans la réalité, car dans sa tête il y a une image mais aussi, une voie, des émotions et des sentiments. Le modèle suivant vient illustrer ce que nous venons de dire : il s’agit du processus de recherche du message.
Quand l’élève va chercher une image dans la réalité, qui est mémorisée, il se remémore une situation d’échec, l’élève est scotché, d’où la page blanche lors de la production écrite. Donc pour mémoriser une situation, ou un mot, nous donnons d’abord le sens, nous demandons aux élèves de décomposer le mot en syllabes, ils l’épellent, le répètent et en dernier ils construisent une phrase avec le mot. Ces activités permettent de mobiliser les facultés essentielles à tout apprentissage à savoir l’attention, la mémorisation, la réflexion ou encore l’imagination. Les élèves s’amusent à trouver des mots à partir d’images ou tout simplement en déclenchant des souvenirs, et les placent dans un répertoire qui sera une banque de mots. Ils arrivent donc à trouver du plaisir à remplacer des mots par des synonymes ou des antonymes, à enlever ou à ajouter des éléments pour construire des vers compréhensibles d’une certaine longueur syllabique7. « on évoluera entre deux pôles : une consolidation syntaxique et grammaticale (exploration des possibilités de la langue) et un approfondissement lexical (intention de « créativité »)8.
Conclusion
L’expérience menée a eu pour objectif principal d’encourager la production de textes poétiques par les élèves du collège. Cette expérience nous a confirmé que ces élèves peuvent être capables de communiquer, en langue étrangère, un message intelligible, notamment en ce qui concerne l’expression de leurs rêves, de leurs propres sentiments et de leurs relations avec autrui. Nous pouvons dire en toute objectivité, que l’implication active à la production de textes poétiques est un savoir-faire fonctionnel qui peut favoriser l’apprentissage du français et améliorer la communication. Nous avons vu qu’il est plus facile de travailler collectivement pour élargir l’horizon linguistique, et déclencher l’élan créateur. Nous souhaiterions enfin que le présent projet puisse être inspirant pour d’autres élèves et enseignants confrontés aux mêmes enjeux de l’enseignement/apprentissage des langues étrangères.
Annexe
Productions poétiques des élèves
Haïkus d’Oran
Grande ville bahia
Dans ton cœur qui rit
Il y a la pluie
Sur ton front de mer.
Long, long, long.
se promène jeune, vieux
Des arbres verdoyants
Des balcons grands
Pour les passants
J’aime marcher dans tes rues
L’après midi, pas le matin.
La folie du shopping !
J’aime les jours passés
Qui ne reviendront jamais
De vraies illusions !
Algérie mon amour
RDV au brésil
Pour un grand match !
Tankas
Je l’ai vu une fois
À la ville nouvelle
L’homme aux cheveux frisés
Personne ne voulait croire !
Un professeur de chez nous ?
Dans son coin
Loin, elle regardait
Tout en prenant soin
De ne rien rater :
De la dispute de deux pigeons.
Oran, une terre immense
Pleine de déchets
Une mer vaste
Infinie, pleine de secrets !
Que va-t-il se passer ?
Mes camarades de classe,
Réfléchissez tous ensemble,
Cherchez, suivez,
L’avenir de mes pensées
Acrostiches
Ouvre ta fenêtre et observe.
Regarde à l’horizon, les couleurs sont toutes là
Ain El Turck est caché dans les montagnes
Nul ne résiste à son charme
Oublie tes problèmes
Reste zen, de bonnes choses arriveront
Allez, lève-toi et regarde en face
Ne lâche pas, la lumière est là
Bibliographie
BUCHETON Dominique, DEZUTTER Olivier (dir.). 2008. Didactique du français : les gestes professionnels. Bruxelles : De Boeck.
Cadre Européen Commun de Référence : 2001, p.86.
CORNAIRE. C. et Ali. (2006) : La production écrite, Coll.DLE. Paris, Clé International. p 9-10.
GOULLIER. Les outils du Conseil de l’Europe en classe de langue. Cadre Européen Commun Et Portfolios. Paris : Didier. 2005. p. 21.
DEBREUILLE Jean-yves, Enseigner la poésie ? Collection IUFM. PU. Lyon. 1996. P 7.
COURTILLON Janine, Elaborer un cours de FLE. Hachette FLE, collection 21. Paris. 2002. P 94.
VYSOTSKI. Lev. Pensée et langage (1934). Traduction de Françoise Sève. Collection « Terrain ». Édition sociales. Paris. 1985. p. 345.
1 Vysotski. Lev. Pensée et langage (1934). Traduction de Françoise Sève. Collection « Terrain ». Édition sociales. Paris. 1985. p. 345.
2 Cadre Européen Commun de Référence : 2001, p.86.
3 Cornaire. C. et ali. (2006) : La production écrite, Coll.DLE. Paris, Clé International. p 9-10.
4 Goullier. Les outils du Conseil de l’Europe en classe de langue. Cadre Européen Commun Et Portfolios. Paris : Didier. 2005. p. 21.
5 Jean-yves Debreuille, Enseigner la poésie ? Collection IUFM. PU. Lyon. 1996. P 7.
6 Bucheton Dominique, Dezutter Olivier (dir.). 2008. Didactique du français : les gestes professionnels. Bruxelles : De Boeck.
7 Voir travaux des élèves en annexe
8 Janine Courtillon, Elaborer un cours de FLE. Hachette FLE, collection 21. Paris. 2002. P 94.