Dr. GUIDOUME Mohamed MC-A
Université de Tiaret. Algérie
Resumé
L’objet de la présente contribution est de vérifier dans une approche descriptive- analytique si la compétence interculturelle est suffisamment prise en considération par les concepteurs du manuel scolaire de français au collège algérien à travers les textes et les objets culturels proposés comme supports pédagogiques. Ces textes supports favorisent-ils l’acquisition de la compétence interculturelle des apprenants au collège ? C’est notre question principale à laquelle nous avons essayé de répondre en analysant les contenus des textes et les thèmes représentés dans le manuel de 4 ème Année.
Grace à une grille d’analyse, nous avons inventorié les objets culturels contenus dans le manuel en explorant leur diversité et mesurant leur pertinence.
Les résultats obtenus nous ont montré que le manuel étudié présente une progression et un choix d’objets culturels qui ne pourront permettre l’appropriation de la langue dans sa dimension interculturelle.
Mots clés: Objets culturels; Compétence interculturelle; Manuel scolaire; Analyse de contenu; Culture
Abstract
The object of this contribution, descriptive, essentially, is to verified in an approach analytic if the intercultural competence is sufficiently taken into consideration by the designers of the manual scholar of French at the Algerian College. Through the texts and cultural objects proposed as teaching aids. Do these supporting texts promote the acquisition of the intercultural competence of learners in secondary school? This is our main question that we tried to answer by analyzing the contents of the texts and the themes represented in the 4th year manual.
Thanks to a grid of analysis, we inventoried the cultural objects contained in the manual by exploring their diversity and measuring their relevance. The results obtained showed us that the textbook studied presents a progression and a choice of cultural objects that will not allow the appropriation of the language in its intercultural dimension.
Key words: Cultural objects; Intercultural Competence, Textbook; Content analysis; Culture
1-INTRODUCTION
Notre contribution a pour objet l’analyse du manuel d’apprentissage de la langue française au collège algérien et ce pour mieux connaitre un des aspects de l’apprentissage de la langue, à savoir l’acquisition de la compétence interculturelle par les apprenants.
Depuis quelques décennies, la mondialisation a imposé la politique de la coopération et des échanges entre les pays de notre monde ; cela est dicté, essentiellement, par des enjeux économiques et stratégiques. Ce changement a engendré une restructuration totale de la vie sociale des individus et a eu un impact sur les représentations de leurs identités culturelles respectives.
La compréhension mutuelle des personnes de pays différents, de leurs systèmes de valeurs, est devenue indispensable pour éviter les conflits qui peuvent surgir suite à cette nouvelle idéologie où domine le profit.
Au niveau des systèmes éducatifs, l’apprentissage des langues étrangères, en tant que mode d’accès à la communication internationale, a fait l’objet de nombreuses recherches sur la nécessité d’enseigner non seulement la langue en tant que telle mais aussi la culture associée à cette langue.
En Algérie, la nouvelle réforme1 considère que l’enseignement du français « devrait permettre aux apprenants d’acquérir un outil de communication pour accéder aux savoirs mais aussi , de se familiariser aux autres cultures et s’ouvrir sur le monde pour prendre du recul par rapport à son propre environnement, pour réduire les cloisonnements et installer des attitudes de tolérance et de paix. »
Il s’agit, donc, d’une approche où il faudrait donner davantage de l’importance à l’apprentissage des faits culturels autant que l’aspect linguistique de la langue. Or, si la dimension culturelle de la langue est partie intégrante de l’apprentissage de celle-ci, qu’en est-il de sa mise en œuvre au niveau de la médiation représentée par le manuel scolaire ?
La présente contribution a pour objet de répondre à cette question. Nous analyserons le choix des textes supports proposés dans le manuel scolaire et leur éventuel impact sur l’acquisition de la compétence interculturelle des apprenants de 4 ème Année Moyenne.
Nous supposons que, la variété des textes dans le manuel scolaire n’est pas suffisante pour que l’apprenant acquière cette compétence préconisée par les orientations scolaires.
Dans une approche, essentiellement descriptive, nous analyserons si la compétence interculturelle est suffisamment prise en considération par les concepteurs du manuel scolaire de français au collège algérien à travers les textes et les objets culturels proposés comme supports pédagogiques.
Grace à une grille d’analyse, nous avons inventorié les objets culturels contenus dans le manuel et étudié leur diversité ainsi que leur pertinence.
Les résultats obtenus nous ont montré que le manuel étudié présente une progression et un choix d’objets culturels qui ne pourront permettre l’appropriation de la langue dans sa dimension interculturelle.
C’est prétentieux de notre part, d’affirmer que l’analyse que nous proposons concernant la problématique de l’interculturel est une approche originale au regard des travaux réalisés par les didacticiens et les théoriciens de divers domaines concernant le sujet. Une quantité considérable de recherches a abordé d’innombrables aspects de la question.
Au niveau épistémologique, notre travail s’est inspiré essentiellement, des travaux les plus pertinents au niveau de la littérature relative au sujet, en particulier, les ouvrages du CECRL, les recherches inities par Geneviève Zarate sur les représentations de la langue et les travaux de M. Abdallah Preteceille , à propos de la notion de culture et le concept corollaire « la compétence culturelle ».
Notre cadre théorique trouve son inspiration au niveau des théories socioconstructivistes qui mettent l’accent sur le rôle des interactions sociales dans la construction des savoirs.
Le plan de notre article s’articule autour des chapitres suivants : Un premier chapitre introductif, dans lequel nous présentons les différentes composantes par lesquels s’est construite notre recherche. Cette partie est suivie par un chapitre théorique où nous exposons le contexte et les définitions des notions que sous-tend le domaine de cette recherche. Nous abordons les différents concepts, à la fois par leurs dimensions polémiques et polysémiques.
Un deuxième chapitre méthodologique expose les différentes péripéties qui ont engendré notre recherche au niveau pratique. Dans cette phase nous présentons le corpus et le protocole de recherche. Cette partie est complétée par la présentation des résultats obtenus puis nous clôturons l’analyse par un chapitre discussions- conclusion dans lequel nous vérifions la validation de nos hypothèses par rapport aux résultats obtenus.
2- CADRE THEORIQUE ET CONCEPTUEL
Ce chapitre développe les notions les plus importantes utilisées dans le cadre de notre problématique à savoir les concepts de « culture et objets culturels », celui de « l’interculturel » et celui de « la compétence interculturelle »
2.1. Définition du terme « culture »
Selon Larousse ( 2000 ) , le mot « culture » vient du latin « cultura » qui signifie le soin que l’on donne à la terre. Ce mot est passé de la culture de terre à la culture de l’esprit par métaphore. L’adjectif « culturel » concerne toutes les activités qui particularisent les peuples, les usages, les coutumes, les manifestations artistiques, religieuses et intellectuelles qui distinguent un groupe, une société.
Il existe une pluralité de définitions du concept « culture ». Son acception dépend de l’école de pensée où l’on s’inscrit et toute nouvelle définition ne peut être exclusive dans la mesure où elle ne peut que s’inscrire dans la continuité des définitions qui l’ont précédée.
La littérature du domaine nous suggère un nombre important de définitions de la notion et sans prétendre l’exhaustivité, nous présenterons, en guise de synthèse, quelques-unes, celles qui sous-tendent notre champ d’analyse puisque ce concept est polysémique et devrait être étudié selon diverses approches. En effet, la notion de culture est le résultat d’un ensemble complexe de phénomènes et ne peut être définie d’une manière simpliste.
Dans une perspective anthropologique, la culture est définie comme « l’ensemble des traits distinctifs caractérisant le mode de vie d’un groupe humain organisé, d’un peuple ou d’une société. » ». ((Lévi-Strauss : 1956 ) .
Au niveau sociologique, Guy Rocher (1969 ), considère la culture comme « un ensemble de manières de penser, de sentir, et d’agir, plus ou moins, formalisées qui, étant apprises et partagées par une pluralité de personnes, servent, d’une manière à la fois objective et symbolique, à constituer ces personnes en une collectivité particulière et distincte.»
Sur le plan psychologique, une culture « est un ensemble de schèmes interprétatifs, c’est-à-dire un ensemble de données, de principes et de conventions qui guident les comportements des acteurs sociaux et qui constituent la grille d’analyse sur la base de laquelle ils interprètent les comportements d’autrui (comportement incluant les comportements verbaux, c’est-à-dire les pratiques linguistiques et les messages). » ( Byram :1989 )
L’ensemble des définitions de la notion de « culture » s’accorde à considérer les données culturelles comme acquises ; ce qui suppose que les faits et objets culturels doivent être pris en compte par l’enseignement, d’une part, et comme ensemble d’objets , de manifestations et d’attitudes qui distinguent une société.
2.2- Les objets culturels
Une des caractéristiques pertinentes d’un objet culturel est la forme signifiante que lui assigne la société où il fonctionne. En effet, tout objet culturel est chargé de sens et est reconnu par le groupe social comme repère identitaire.
Meyer, (2010), suppose que les objets culturels « recouvrent des réalités aussi diverses que des objets concrets, des abstractions, des personnes, des concepts, des lieux et des sites, des attitudes et des rituels ».
Diet, E. (2010), pour sa part, définit la notion d’« objet culturel » comme « tout objet psychique ou matériel susceptible de fonctionner comme producteur de sens permettant une régulation ou une transformation des dynamiques pulsionnelles et des scénarios fantasmatiques, mais aussi des liens ».
Bourdieu (1979) considère les objets culturels comme « des repères dans les discours, des pôles chargés de sens et de substance qui alimentent les pensées, les conversations, les analyses, les descriptions »
Ces objets peuvent être spécifiques et différents à des groupes sociaux comme ils peuvent être partagés. Souvent, leur différence engendre des malentendus et des conflits entre interlocuteurs et ce même dans des situations intralingues. D’où la formation linguistique n’a pas seulement pour objectif la maîtrise de la langue étrangère dans son aspect langagier mais, également dans sa dimension culturelle.
2.3. La notion de « l’interculturel »
Selon le dictionnaire Larousse (2008 ) , la notion de l’« interculturel » vient du latin : « inter » qui veut dire « entre », avec le sens de réciprocité et « culturel », « cultura », qui veut dire culture, agriculture.
En synthétisant nombreuses définitions, nous pouvons dire que le terme interculturel qualifie ce qui concerne les rapports ou contact entre plusieurs cultures ou groupes de personnes de cultures différentes.
Concernant, l’enseignement des langues étrangères, ce concept a été introduit, au cours des années quatre-vingt, pour désigner un mode particulier d’interaction et d’interrelation qui se produit lorsque des cultures différentes entrent en contact ainsi que l’ensemble des changements et des transformations qui en résultent. (C. Clanet : 1993, p.22).
En parlant d’interculturel, pour nous, deux références sont incontournables : Le Cadre européen commun de référence pour les langues. ( CECRL : 2000 ) qui a institué l’enseignement de la culture dans le cadre d’un cours de langue étrangère et ce pour installer essentiellement la compétence interculturelle qui représente un enjeu éthique et ce pour lutter contre le racisme et l’ethnocentrisme qui ont sévi durant le débuts des années 70 et M. Abdallah Pretceille, qui durant les années 2000 a proposé un nombre important de travaux relatifs à la question.
Pour nos deux références, l’approche interculturelle considère que chaque groupe humain possède une culture différente qui lui est propre et qu’il n’existe pas une culture, mais des cultures dont certaines coexistent et interagissent. L’interculturalité suppose, donc, l’ouverture de soi a l’autre, et l’apprentissage d’un savoir-vivre ensemble.
Selon l’approche théorique proposée par M. Abdallah Pretceille (2003), « la pédagogie interculturelle est née comme une stratégie éducative qui cherche à réduire les conflits, les dysfonctionnements et les problèmes qui ont lieu dans les processus d’acculturation, assimilation et intégration des immigrés à la société française. »
2.4- La compétence interculturelle
Comme nous l’avons déjà précisé, le but de l’enseignement / apprentissage d’une langue étrangère n’est pas exclusivement langagier mais comme la langue et la culture sont deux facettes indissociables, les apprenants doivent, également, acquérir une compétence interculturelle qui leur permettra de comprendre le monde et de s’adapter et s’ouvrir sur la civilisation universelle.
L.Porcher (1988), souligne qu’apprendre une langue, c’est être « capable de percevoir les systèmes de classement à l’aide desquels fonctionne une communauté sociale. ». Cela suppose que l’école devrait apprendre aux apprenants à s’enrichir au contact d’individus de culture différente en développant leur compétence interculturelle et ce pour leur permettre de comprendre et d’accepter l’Autre dans ses différences.
La compétence interculturelle permet aussi, à l’apprenant de développer sa personnalité et son identité, de s’ouvrir à des expériences culturelles nouvelles et enrichir sa disposition à l’altérité. Il s’agit, donc de veiller à offrir aux apprenants les moyens qui leur permettent de prendre conscience de la nature profondément sociale de l’être humain, de relativiser et de contextualiser leur culture par rapport à la culture de l’Autre.
3.-MATERIEL ET METHODE
Dans ce chapitre, nous présentons la méthode adoptée pour notre étude, les critères qui ont sous-tendu l’élaboration de notre grille d’analyse puis le corpus choisi.
3.1-Le type de recherche et technique d’analyse
Notre démarche suivra celle de T.A. Aranzazu ( 2010 ) qui s’est inspiré de plusieurs analyses de travaux relatifs à l’étude des langues étrangères diverses : De Méo (1982) , de Choppin (1992),qui ont analysé le manuel par rapport à sa dimension idéologique et culturelle ; Uber (1992), ), qui a analysé le contenu culturel des manuels d’espagnol . En outre, Lund (2006) a étudié le contenu culturel des manuels d’anglais langue étrangère et enfin, Pitois (1997) qui s’est intéressé au lexique dans les manuels d’enseignement du français langue seconde ainsi que Sercu (2000), qui a étudié l’acquisition de la compétence de communication interculturelle à partir des manuels d’allemand.
Dans leurs études sur la langue et la culture dans les manuels scolaires, ces chercheurs ont opté pour la procédure qui consistait à établir l’inventaire puis analyser les objets culturels proposés. Leur critère principal d’analyse du contenu culturel était le nombre et la diversité des références culturelles relevées dans les manuels
Selon Mucchielli, (1988) , l’analyse de contenu est « une techniques d’analyse des textes utilisant des procédures systématiques et objectives de description permettant le traitement méthodique du contenu implicite et explicite des textes en vue d’en classer et d’en interpréter, par inférence, les éléments constitutifs. »
Nous analyserons le contenu de tous les textes proposés comme supports pédagogiques dans les différentes activités prévues pour les divers projets du programme.
Nous rappelons que l’objectif principal de cette recherche est de savoir quel est le contenu culturel représenté par l’ensemble des textes du manuel de français de la quatrième année moyenne ? ; il s’agit, en effet, d’étudier le contenu culturel des textes afin de déterminer la diversité culturelle et son adéquation avec la réalité des apprenants, d’une part, et avec les orientations officielles, d’autre part.
3.2. Le manuel scolaire
Le manuel scolaire est un outil pédagogique qui a un rôle de médiation et d’accompagnement pour les apprenants et les enseignants dans l’acquisition et la transmission des savoirs et la connaissance. Généralement, c’est l’institution qui impose les contenus du manuel scolaire et ce pour diverses raisons, principalement celles liées aux changements de programmes engendrés par les nouvelles orientations méthodologiques.
Les manuels sont conçus par des enseignants et des inspecteurs de la discipline qui proposent des textes conformes aux orientations et aux instructions officielles. Or, le plus souvent, ce sont les aspects idéologiques et culturels qui orientent ces choix et créent des controverses. Ce phénomène n’est pas spécifique à l’Algérie mais on le retrouve partout. La subjectivité des auteurs des manuels est, le plus souvent, inévitable. Les choix « obéissent à des objectifs politiques, moraux, religieux, esthétiques, idéologiques, le plus souvent implicites ». ( Choppin, 1992)
Le manuel scolaire de français langue étrangère de la quatrième année, constitué de 290 pages, édité en 2014 est conçu par une équipe de professeurs de l’enseignement moyen. Le livre couvre le nouveau programme subdivisé en trois projets et organisé en séquences et rubriques. La compétence globale annoncée dans la page du sommaire vise la compréhension / expression orale et écrite en fin de parcours.Chaque séquence est organisée en activités qui visent, essentiellement, l’installation de compétences langagières à travers des batteries d’exercices de lexique et de syntaxe.
3.3-Elaboration de la grille d’analyse
Pour élaborer notre grille d’analyse, nous avons établi une classification des objets culturels sous forme d’une catégorisation des références par thème. La pluralité des thèmes ne peut nous permettre d’aborder tous les sujets ; nous en avons, donc choisi les plus pertinents, ceux qui, à notre sens, sont significatifs pour des apprenants algériens au collège et ceux les plus cités dans le manuel.
Les thèmes retenus sont au nombre de sept: l’écologie, les fléaux sociaux, le tourisme, la culture, l’Histoire, les coutumes et les loisirs.
La lecture de chacune des pages du manuel nous a permis de quantifier et de classer les objets culturels. Les données ont été présentées dans un tableau avec le pourcentage des catégories de chaque thème.
4. LES RESUTATS
Dans ce chapitre, nous présentons les résultats relatifs à la distribution des textes au niveau de chacun des trois projets proposés dans le manuel puis nous exposons le nombre et la répartition des thèmes des références culturelles selon leur appartenance.
Les résultats sont présentés en chiffres et en pourcentages.
4.1. Présentation des résultats relatifs aux type et genre de textes
Tableau N° 01 : Distribution des textes au niveau de chaque projet
Projets |
Textes |
Type | Genre | |||||
Expositif |
Argument |
Narratif |
Roman |
Fable |
Conte |
Nouve-lle |
||
01 |
14 |
03 |
10 |
01 |
01 |
00 |
00 |
00 |
02 |
10 |
01 |
02 |
07 |
00 |
02 |
04 |
01 |
03 |
07 |
02 |
02 |
05 |
01 |
01 |
02 |
01 |
Total |
33 |
06 |
14 |
13 |
02 |
03 |
06 |
02 |
La lecture du tableau nous montre que le manuel compte environ 33 textes supports dont presque la moitié est de type argumentatif et la seconde est constituée de textes expositifs et narratifs, essentiellement des contes étrangers. Nous constatons qu’il n’y a que deux extraits de roman dans tout le manuel. Pourtant, les textes littéraires, en particulier les extraits de romans constituent les meilleurs supports didactiques d’enseignement de la langue et de la culture. Ce type de texte ne devrait pas être considéré, simplement, comme prétexte pour les exercices en langue française pour l’appropriation des différentes compétences en lecture, en grammaire ou dans une autre activité. En effet, l’exploitation des textes littéraires en classe de fle, devrait former à une compétence aussi importante que la compétence dite « linguistique », à savoir la compétence interculturelle. Ce déficit suppose que le manuel n’est pas en adéquation avec des directives institutionnelles relatives à l’enseignement de la langue française.
4.2. Présentation des résultats relatifs à la répartition des thèmes des références culturelles selon leur appartenance
Tableau N° 02 : Répartition des thèmes des références culturelles selon leur appartenance
Thèmes | Nombre |
Référence sociale |
|||
Occurrences |
Pourcentage |
Algériens |
Autres |
Partagés |
|
Education / Fléaux sociaux |
10 |
33. 03 % |
03 |
04 |
03 |
Environnement |
09 |
24.27 % |
01 |
03 |
05 |
Tourisme |
06 |
18.18 % |
03 |
02 |
01 |
Extraits de roman |
03 |
09.10 % |
01 |
02 |
00 |
Loisirs/ Sport |
02 |
06.06 % |
00 |
01 |
01 |
Coutumes |
02 |
06.06 % |
01 |
01 |
00 |
Histoire |
01 |
03.30 % |
01 |
00 |
00 |
Total |
33 |
100 % |
10 |
13 |
10 |
Si on se réfère au Cadre européen ( CECRL) et à la liste des différents aspects des traits distinctifs caractéristiques d’une société et de sa culture qu’il propose et laquelle les enseignants devraient prendre en charge lors de leurs pratiques, nous remarquons que les thèmes développés dans ce manuel ne sont pas assez diversifiés et surtout, qu’ils ne sont pas assez pertinents pour l’acquisition de la compétence interculturelle prônée par les directives institutionnelles relatives à la dimension interculturelle de l’enseignement de la langue française.
Parmi les 33 références culturelles relevées dans le livre, 23 soit environ 60 % de toutes les références font allusion à la culture étrangère ou partagée. Les références spécifiquement algériennes ne sont pas suffisamment représentées ( 33 % ). De plus, les objets culturels étrangers proposés dans le manuel ne semblent pas s’inscrire dans la visée interculturelle fondamentale de l’institution, à savoir la compréhension mutuelle des personnes de pays différents, de leurs systèmes de valeurs.
Nous avons relevé que le thème « Eduction / fléaux sociaux est le plus traité, représentant 33 % de l’ensemble des thèmes (soit 10 textes). Le deuxième thème représenté est celui relatif à l’environnement avec plus de 09 occurrences soit un pourcentage de 24 % par rapport à l’ensemble des textes qui évoquent les problèmes écologiques que partage tout le monde. Cependant, nous relevons ceux qui ont une spécificité locale telle que la désertification et la pauvreté.
Le thème du tourisme occupe la troisième place avec 18 % et est représenté par le troisième projet. L’analyse des contenus des textes nous indique que si l’objectif des séquences prévues est d’inciter à la découverte et à la mise en valeur des aspects attractifs, les supports proposés ne sont pas appropriés pour concrétiser cet objectif.
Le thème de « l’Histoire » est carrément absent. Pourtant, c’est un sujet qui comporte le plus de malentendus et qui devrait faire l’objet d’étude pour enrichir chez l’apprenant la disposition à l’altérité et réduire les conflits entre les peuples de cultures différentes.
Ceci est valable , aussi, pour les autres thèmes , le divertissement et les coutumes sont des thèmes qui s’apprêtent le mieux pour permettre la découverte culturelle ; or nous remarquons qu’ils ne représentent qu’une proportion insignifiante de 04 textes soit environ 10 % du total .
5. DISCUSIONS ET CONCLUSION
Nous rappelons que l’objectif de notre étude est, d’une manière générale, orienté vers l’analyse des textes utilisés dans le manuel et vise, en particulier, l’étude des composantes de l’interculturalité dans les supports pédagogiques proposés. Il fallait vérifier si les objectifs relatifs à la compétence interculturelle sont pris en charge lors de l’élaboration du manuel .Le corpus étudié est constitué par l’ensemble des textes utilisés dans le manuel scolaire.
La méthodologie choisie s’est basée sur la méthode d’analyse de contenu ; nous avons adopté une approche analytique et descriptive des textes supports que nous propose le manuel scolaire de la quatrième année moyenne. Le choix de notre sujet s’inscrit dans la perspective pédagogique qui vise le développement de la compétence interculturelle dans l’enseignement de la langue française.
D’une manière générale, les résultats de notre investigation dévoilent que le manuel analysé reflète une faible prise en charge de la dimension interculturelle. En effet, le manque de contenus spécifiques à la formation interculturelle est important malgré la timide ouverture du manuel à la culture française. Nous remarquons qu’il y a très peu de références aux habitudes de la vie quotidienne des apprenants, aux conditions de vie, aux relations interpersonnelles, au système de valeurs, aux croyances, au savoir-faire, aux comportements. .
Nous notons l’absence, dans le manuel, d’objets relatifs à l’art, à la culture et au sport, au théâtre, au cinéma. Or, Il est impératif que les textes choisis soient en adéquation avec l’époque de l’apprenant car la description des faits culturels anciens pourraient être en décalage avec le présent de l’élève et par conséquent, la motivation des apprenants n’est pas stimulée.
Nous supposons que peu d’intérêt est accordé au volet culturel dans l’élaboration du manuel, ce qui certainement freine et ne peut participer au développement de la compétence interculturelle de l’apprenant.
Les orientations recommandent explicitement la prise en charge de la dimension culturelle. Or, l’accent semble être mis sur un apprentissage basé essentiellement sur la maîtrise de la langue. Les concepteurs du manuel semblent se focaliser beaucoup plus sur la langue. En effet, la proportion importante des exercices de langue préconisée et l’annonce de l’objectif ainsi que les principes méthodologiques dans le sommaire du manuel traduit explicitement les intentions des concepteurs du livre : la dimension utilitaire
Toute recherche suppose des difficultés, la nôtre n’en fait pas exception. En effet, la courte durée de la recherche et le peu de moyens mis à notre disposition pourraient avoir une influence sur les résultats trouvés. Par ailleurs, nous devons signaler que l’analyse du contenu d’un manuel est une activité difficile nécessitant un travail théorique et pratique d’investigation énorme pour prétendre proposer des conclusions valides. Peut-être, c’est pour cela que nous avons choisi la facilité, nous avons opté pour la méthode descriptive.
En ce qui nous intéresse, cette recherche a été pour nous une riche formation qui nous a amené à prendre conscience de l’importance de ce domaine .Nous avons découvert, également, un ensemble d’éléments théoriques très utiles, qui étaient pour nous inconnus avant d’entamer ce travail de recherche.
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