Traduire pour la scène: Le complexe de Thénardier de José Pliya et l’ ‘hospitalité’ de la traduction

Cetti Rizzo
(Università degli Studi di Catania)
crizzo@unict.it

Abstract

In Anlehnung an die Theorien von Berman, Jabès, Prete und die philosophischen Überlegungen zur „humanité commune“ von Souleymane Bachir Diagne in dem Band De langue à langue, l‘Hospitalité de la traduction beleuchtet der Beitrag die Experimente des neu durchdachten und auf der Bühne vermittelten Wortes, verstanden als Raum der Begegnung und des Dialogs, anhand des Werks Le complexe de Thénardier von José Pliya, einem aus Benin stammenden Autor, der in Europa ausgebildet wurde und seit vielen Jahren Direktor des Artchipel (Scène Nationale de la Guadeloupe) ist. Insbesondere werden die Übersetzungsstrategien und die szenischen Effekte eines multikulturellen und stratigrafischen Textes, der Ausdruck des Théâtre-Monde ist, im Zusammenhang mit dem Konzept der ‚Gastfreundschaft‘ untersucht.

Seguendo le teorie  di  Berman, Jabès, Prete e le riflessioni filosofiche dell’ ‘ humanité commune’ di  Souleymane Bachir Diagne nel volume De langue à langue, l’Hospitalité de la traduction, il saggio mette in rilievo le sperimentazioni  della parola  ripensata e veicolata  sul palcoscenico, inteso come spazio di incontro e dialogo, attraverso l’opera  Le complexe de Thénardier di José Pliya, autore originario del Bénin, formatosi in Europa e direttore per molti anni dell’ Artchipel ( Scène Nationale de la Guadeloupe). In particolare, vengono evidenziate le strategie traduttive e gli effetti scenici di un testo multiculturale e stratigrafico, espressione del Théâtre-Monde, in relazione al concetto di ‘ospitalità’.

Following the theories of Berman, Jabès, Prete and the philosophical reflections of Souleymane Bachir Diagne’s “humanité commune” in the volume De langue à langue, l’Hospitalité de la traduction, the essay highlights the experiments of the word rethought and conveyed on the stage, understood as a space of encounter and dialogue, through the work Le complexe de Thénardier by José Pliya, an author originally from Benin, trained in Europe and director for many years of the Artchipel (Scène Nationale de la Guadeloupe). In particular, the translation strategies and scenic effects of a multicultural and stratigraphic text, an expression of the Théâtre-Monde, are analysed in relation to the concept of ‘hospitality’.

Faire l’éloge de la traduction […] C’est célébrer le pluriel des langues et leur égalité. C’est s’opposer à l’inscription de la traduction dans un monde d’échange inégal, c’est rappeler que la visée du travail même de traduire, de la tâche du traducteur, de son éthique et de sa poétique est de créer de la réciprocité, de la rencontre dans une humanité commune.

(Souleymane Bachir Diagne, De langue à langue, l’hospitalité de la traduction)

Introduction:

La scène est l’espace de la rencontre, du dialogue et de l’expérimentation d’une ‘humanité commune’: les propos de Souleymane Bachir Diagne, dans son volume De langue à langue, l’hospitalité de la traduction1, sont des phares pour les pratiques de cette typologie traductive, car les textes dramatiques exigent un passage fondamental de l’écriture à l’oralité, et la parole traduite est d’abord parole prononcée.1

Le processus de transformation passe du monologue intérieur de l’interprète-traducteur à une confrontation avec l’autre, qu’il s’agisse du metteur en scène et/ou de l’acteur et, enfin, du public. D’une certaine manière, il s’agit de se mesurer continuellement à un mot qui n’est plus écouté dans un soliloque, mais qui doit être calibré sur les tons de la voix et du corps de l’acteur dans la langue cible.

Le défi devient encore plus complexe si les œuvres appartiennent à des dramaturges contemporains qui ne sont pas encore publiées en Italie et sur lesquels la parole des critiques est in fieri, manquant encore de la distance nécessaire à un jugement global et à une classification précise dans le panorama littéraire : sur l’extrême contemporain on ne peut procéder que par tâtonnements, tant au niveau de l’interprétation que de la traduction. Tout est risqué, contextualisé dans un hic et nunc.

Cette contribution sera structurée en trois étapes. Dans la première nous présenterons les points de repères théoriques dans le domaine de la traductologie liés au concept d’hospitalité, puis nous introduirons l’œuvre générale de l’écrivain béninois José Pliya, en focalisant notre attention sur la pièce Le complexe de Thénardier pour analyser les principales stratégies adoptées dans la praxis traductive et de mise en scène.

Les conclusions reviendront sur l’idée d’ouverture : la rencontre des cultures dans l’expérience de la traduction, vécue comme espace d’accueil est-elle possible, là où l’autre est le même sur le plan éthique et culturel ?

Méthodologies sur le signe de l’hospitalité

Antoine Berman propose une magnifique métaphore pour parler de la traduction : dans son ouvrage La Traduction et la lettre ou l’auberge du lointain,2 il reprend les mots du troubadour provençal Jaufré Rudel : ‘l’auberge du lointain’, le lieu où l’étranger trouve l’hospitalité, où l’humanité garantit la rencontre et l’échange. La traduction est cette expérience de partage de sa propre humanité avec l’autre.

Le livre de l’Hospitalité d’Edmond Jabès dans la traduction italienne d’Antonio Prete3 parle d’une nouvelle forme d’accueil, ancienne mais toujours actuelle : la traduction comme lieu d’écoute, espace de compréhension et d’intégration. En effet, l’expérience de la rencontre entre Jabès et Antonio Prete à Paris, avant la mort de l’essayiste égyptien, s’ouvre sur un geste, tel que le raconte le traducteur italien lui-même. Sa poétique du traduire, esquissée dans All’ombra dell’altra lingua, inspirée de Bermann et de Meschonnic, fait de l’acte de traduire un moment éthique de dialogue, d’exégèse et de partage de l’altérité.

Souleymane Bachir Diagne célèbre l’égalité des langues à travers la traduction, en abordant les questions de l’universel et du pluriel, de la réciprocité et de l’hospitalité, dans un but éthique et dans une visée humaniste:

Ce livre présente une réflexion sur la traduction et sur sa capacité, son pouvoir de créer une relation d’équivalences, de réciprocité entre les identités, de les faire comparaître, c’est-à-dire paraître ensemble sur un pied d’égalité, en faisant que de langue à langue on se parle et on se comprenne. Comme l’a écrit Antoine Berman, la traduction n’est rien si elle n’est mise en rapport. Ce livre se veut donc un « éloge de la taduction » et une invitation à la reconnaître comme un « humanisme », exprimant une vision optimiste de ce qu’elle peut accomplir4.

Dans une œuvre méthodologique sur la traduction du texte théâtral, Thiériot affirme5 :

Il faut penser les modalités de la traduction théâtrale dans le contexte de la production dramaturgique qui se déroule au même moment dans la société réceptrice6.

Le traducteur plonge l’acte de communication dans la culture réceptrice, mais les codes universels passent par l‘ordre du dicible qui caractérise une société. La traduction littéraire est elle-même nécessairement historisée ; c’est même une traduction qui obéit aux règles de l‘historicité, une traduction qui doit s’adapter à la vie du spectacle dans un espace et un temps précis.

Pour un théâtre-Monde7

Dans l’extrême variété des thèmes, des situations et des structures, dans le théâtre de José Pliya, issu d’une famille originaire du Bénin8 et apparentée aux anciens souverains du royaume du Dahomey9, apparaissent des métaphores obsédantes qui reviennent comme des échos de voix lointaines: la région de l’enfance, véritable paradis perdu, les liens forts et ambigus tissés au sein de la famille. Dans ce contexte domine la figure forte et envahissante de son père Jean, personnage illustre, engagé politiquement et intellectuellement, auteur de Konda le requin, qui incarne le lien à la patrie, les lois et les traditions de son pays. La première question à résoudre pour le fils est de se débarrasser de son père, en le ‘tuant’ sur la scène de Kondo le roquet10, sorte de pastiche de l’œuvre paternelle avec d’évidents souvenirs pirandelliens, et de mettre à distance sa patrie, jamais répudiée, mais toujours vécue à travers l’espace critique d’un ailleurs11. La formation de José Pliya est un véritable carrefour de cultures et de langues, et son attachement à la scène se traduit par les initiatives qu’il mène aux Antilles, en Martinique, en Guadeloupe et à Marseille depuis plusieurs années pour promouvoir le théâtre en français, en anglais, en espagnol et en créole12 ; par la création de résidences d’écriture pour dénicher les talents de la dramaturgie contemporaine.

Dans les structures fermées et claustrophobiques de ses pièces, perçues comme sans issue apparente, les didascalies, volontairement inexistantes ou presque, réduites à l’essentiel, indiquent à peine le chemin au traducteur et au metteur en scène, et laissent très peu de traces pour ne pas se perdre dans le labyrinthe. Chacun trouvera, s’il le peut, son propre fil rouge. Son langage a la puissance des images archétypales et la simplicité d’un registre familier et quotidien. Dans cette praxis traductive, les prémisses théoriques sur le concept d’hospitalité ont été des guides: le regard fixé sur le corps de l’acteur et sur les tonalités de sa voix.

Le Complexe de Thénardier : la stratigraphie d’un texte multiculturel

Nous nous bornerons ici à illustrer les étapes de la traduction et de la mise en scène du Complexe de Thénardier13 ; c’est la pièce pour laquelle Pliya a reçu le prix Jeunes auteurs dramatiques décerné par l‘Académie française, l’œuvre dans laquelle, plus qu’ailleurs, on ressent le double lien avec l’Afrique et l’Europe.

A travers une alternance raffinée de citations savantes et d’énoncés quotidiens prononcés dans un faux dialogue, qui n’est autre qu’un monologue intérieur, nous pouvons sentir la construction paratactique de l’ethnie Fon du sud du Bénin14 qui caractérise la langue de la mère de Pliya et que l’auteur transpose dans la voix de la Mère, dans une confrontation serrée avec la fille-servante.

On dirait un lointain souvenir de Cendrillon et de sa marâtre, avec les deux autres enfants toujours présents dans les mots mais absents sur scène, sauf qu’ici le prince charmant (le soldat bleu) tant attendu n’arrive pas et que la jeune fille doit décider elle-même de quitter la maison-prison ou d’y rester, d’assumer le poids de sa décision ou de se plier à la volonté de son bourreau.

Mais les apparences sont trompeuses et cette servante, si impuissante et docile, si seule et fragile, a un pouvoir absolu sur les choses, sur les objets à travers lesquels elle s’exprime et prend le contrôle de la maison. Ce qui paraissait si évident est renversé :

Vido : J’ai toujours su que ce serait très compliqué. Je m’en veux. Je m’en veux de ne pas me faire comprendre. Je suis si gauche avec les mots. Si ce n’était de l’arrogance, je vous inviterais à regarder votre maison. Les choses parlent mieux que les mots. Regardez comme elle est bien nettoyée, lavée, balayée, astiquée, dépoussiérée, blanchie, repassée, préparée, rangée. Comme elle ne l’a jamais été. Une maison neuve, pour un nouveau départ et pour tourner la page de ma présence ici. C’étaient mes mots à moi. Mes au revoir. Mais je savais que vous auriez du mal à comprendre15.

Les petites [Vido]mingons, qui désignent au Bénin des jeunes filles pauvres, mises au service de familles plus aisées parce que les parents ne peuvent subvenir à leurs besoins, sont la réalité à partir de laquelle l’auteur a commencé sa pièce16. Les souvenirs de son enfance, la voix de sa mère qui donne des ordres sur un ton à la fois dur et tendre, l’observation des jeunes filles qui font semblant de ne pas comprendre les dialogues en français de leurs maîtres et la fascination perverse de contrôler les autres, le plaisir troublant de la servitude, sont les enjeux du Complexe de Thénardier.

Victor Hugo, avec la petite Cosette, captive et proie du couple cupide des Thénardier, semblent vraiment lointains, tout comme l’Afrique subsaharienne avec ses clichés à l’usage et à la consommation de l’imaginaire occidental.

Le substrat africain s’échappe continuellement et apparaît là où il semble le plus inattendu et le plus surprenant, et subvertit toujours les schémas pour insuffler le sentiment d’un territoire en perpétuel déplacement, impliqué dans un voyage interminable, d’une expérience migratoire sans fin. L’Afrique est ailleurs : la génération d’artistes des années quatre-vingt témoigne d’une expérience de l’Afrique au-delà des frontières africaines, d’une remise en cause des traditions qui marquent en fait leurs évolutions.

Dans Le Complexe de Thénardier, il s’agit d’une mise en relation de deux tensions très fortes qui se battent pour des objectifs différents ; c’est de cet enjeu que part la traduction du texte dans la première phase : l’énergie de la fille-servante qui veut partir et celle opposée et tout aussi violente de la mère-maîtresse qui essaie de la retenir ; la langue se déploie sur un double plan qui exprime deux faux dialogues, en réalité des monologues intérieurs prononcés à haute voix et qui ne se rencontrent que par moments. Les mots s’écoulent en alternant les niveaux de la plus intense poésie et ceux de la morne quotidienneté ; ils expriment, à travers deux forces perpétuellement contrastées, une ‘errance statique’.

La Mère : Leçon première : ceci est une cuisine. On y repasse le linge. On le lave à la main comme les lavandières aux temps anciens. On y sèche le linge sur des guirlandes d’étoiles. On marche sur les étoiles ou peut-être qu’on y danse pour atteindre le ciel ou peut-être les toilettes. La fosse des toilettes. […] Troisième leçon : ne pas confondre torchons avec serviettes. Un torchon c’est pour les toiles d’araignées. Ça sert aussi à déboucher les éviers, les siphons. Une serviette c’est pour les larmes et pour le nez et pour le cœur, quand il y a trop de fuites. Ça sert à le moucher17.

Dans une sorte de délire croissant, l’une révèle à l’autre, c’est-à-dire chacune à elle-même, un lien malsain mais inexpugnable nec tecum nec sine te ; les couples pathétiques, grotesques, cruels et inséparables des premières pièces de Beckett semblent projeter leur ombre sinistre. La mère ne peut se passer de la présence de sa fille, c’est-à-dire de la servante ; Vido ne peut tolérer de vivre avec celle qui la retient prisonnière, lui imposant une existence à la limite de la dignité humaine, et qui pourtant, dans ses souvenirs, lui a sauvé la vie en la cachant pendant une rafle de la police. Leurs existences se brident et la faille devient une déchirure :

La Mère : Je vous l’interdis. Si vous sortez, vous êtes morte. Si vous marchez, vous êtes morte. Avant même que de parler au premier passant vous êtes morte. Comprenez bien : dehors vous n’existez pas. Ils ont choisi de nier toute trace de votre humanité. Vous savez, comme un enfant efface un beau dessin qu’il juge inachevé, imparfait, incomplet. Alors il efface, avec rigueur, avec méthode, avec application, pour rendre à la feuille sa blancheur, sa pureté. Mais des ombres subsistent partout et l’enfant devient furieux. Alors il gomme, gomme, gratte la feuille jusqu’à la déchirer. Jusqu‘ à la déchirure18.

Vido veut une bénédiction avant de partir, comme c’est la coutume au Bénin19. En réponse, sa marâtre la maudit et empêche par tous les moyens qu’elle parte : la parole devient alors imposante, menaçante, persuasive, captivante, agressive, jusqu’à atteindre un paroxysme cruel, puis elle redescend et devient une prière, une supplication :

La Mère : Je vous maudis, Vido. Je vous maudis. Et je mets toute ma force dans cette malédiction, pour qu’elle vous accompagne et vous précède. Vous êtes méchante. A force de manier le plumeau, vous tutoyez l’âme de ma maison : A force de saleté tous les jours nettoyée, vous êtes maîtresse de nos consciences, de nos pulsions et de nos vices. A force de côtoyer l’intimité vertigineuse des poubelles, vous avez pris pouvoir chez moi. Un pouvoir étonnant. Vous tenez le système. Vous possédez les clés. Et moi, je n’ai plus que mes genoux pour vous supplier : ne m’abandonnez pas.
Vido : Relevez-vous Madame. Ce n’est pas convenable.
La Mère : Ne me touchez pas. Je vous supplie de ne pas partir. J’ai besoin de vous. Je vous en prie. Ne me laissez pas tomber. Service, service : le luxe suprême. Vous m’en avez donné le goût. Ne me laissez pas en rade.
Vido : Madame, s’il vous plaît, relevez-vous. S’il vous plaît.
La Mère : Ne me touchez pas Ne partez pas. C’est une prière que je vous fais. Daignez la recevoir sur tous les tons. Je vous offre toute la gamme de mon humiliation. Servez-vous, c’est votre tour. Profitez-en. Abusez. Mais ne partez pas.
Vido : Ne pleurez pas, Madame. Ce n’est pas sérieux. Madame.
La Mère. Apprenez-moi à balayer. Dites-moi le nom des choses. Les choses de ma maison. J’ai perdu le chemin entre ma chambre et le grenier. Prenez-moi par la main. Je vous en supplie, je suis perdue. Je suis perdue20.

Mais le dialogue révèle tous ses pièges. Peut-être seule l’action parviendra-t-elle à dissuader la servante de son dessein, et le geste que la Mère choisit est extrême, sans retour, le suicide. Mais Vido n’écoute pas et ne voit pas l’autre, elle parle à elle-même et nie aussi la réalité de la mort de son bourreau et de sa victime. Elle continue comme une servante docile et fidèle, couvrant le corps exsangue de Madame pour qu’elle ne prenne pas froid et se repose paisiblement après une nuit de travail épuisant. Ses mots sont humbles, rêveurs, évocateurs, mais ses tons deviennent, par moments, durs, froids, détachés, déterminés jusqu’au mensonge.

L‘incipit révèle déjà son épilogue, tout commence par la fin, tout est déjà accompli : Vido à côté du corps inanimé de la mère-maîtresse déclare vouloir partir, mais le mot n’est pas suivi du geste, et le spectateur voit en arrière-plan le couple Ham-Clov de Fin de partie, avec un paralytique confiné dans un fauteuil roulant, immobile au milieu de la pièce, et son serviteur-fils qui, jusqu’à la fin de la partie, déclare «Je te quitte»21 sans faire le moindre mouvement. Le schéma beckettien réapparaît dans la mise en scène de la pièce à Catane, avec des parcours géométriques fermés dans un espace labyrinthique : Vido se déplace comme si elle était contrainte à des parcours obligatoires qui ne lui laissent pas le choix, seul le mot devient une tentative d’évasion. L’ailleurs, comme chez Beckett, n’est évoqué que par le verbe ; l’espace extérieur est raconté par la voix.

Une voix qui nous fascine en illustrant des scénarios de contes de fées, de princes et de promesses de paradis terrestres, mais qui nous expose aussi à des révélations d’âme d’une dureté à la limite du supportable.

En fin de compte, ce texte nous libère toujours de toute forme de jugement faussement moral, en mettant sous nos yeux la souffrance sans emphase ni dissimulation.

Les démarches dans la praxis traductive :

Dans la complexité des différentes phases traductives, nous proposons une sélection des principales opérations qui relient la forme et le fond :

    1. Double plan et double sens/ réel-féerique,

    2. Explicitation,

    3. Traduction du rythme,

    4. Métaphorisation et personnification,

    5. Substitution impliquante,

    6. Ajout pour les effets scéniques.

1. Double plan-double sens

En ce qui concerne l’expression Soldat bleu, nous avons voulu laisser le double plan du conte et de la réalité tout au long du texte, jouer avec l’image des casques bleus de l’ONU et du prince de contes de fées, également souhaité par l’auteur. D’autre part, la protagoniste attend son prince pour la libérer des griffes de sa marâtre et l’emmener dans une terre promise. L’attente sera inutile et vaine, aucun prince ou soldat bleu ne viendra la sauver et elle devra assumer tout le poids de sa décision.

Le plan féerique a été maintenu grâce à la capacité de la voix-corps de Vido, Elaine Bonsangue sur scène, dans la création de l’espace mental d’évasion, et l’expression soldat bleu reste toujours suspendue entre rêve et réalité. Vido ne peut dire avec certitude si elle lui a parlé ou si elle l’a seulement imaginé. Son rêve reste cependant intact : même s’il ne vient pas la chercher, elle partira. Ou du moins elle le dira, mais l’épilogue, complètement ouvert, malgré la structure rigoureuse de la pièce, dans la mise en scène de Catane, la voit immobile, avec sa valise pleine de rêves.

2. Explicitation

Pour rendre l’image de la région américaine du Dakota nous avons adopté une démarche d’explicitation22 à travers l’extension territoriale du Nord, pour nourrir un imaginaire positif et optimiste. Pour une réception efficace dans le contexte culturel italien, la simple indication de Dakota risquait de ne pas ouvrir à l’espace du rêve. Le concept de Nord a la force de construire une dimension d’attente pour un avenir meilleur.

Je ne sais plus. Je ne sais plus si je l’ai vu, le soldat bleu, ou bien rêvé. Mon beau soldat aux cheveux bleus et à l’accent. Le fort accent du Dakota. Je l’entends encore me dire qu’il serait là, à cette heure-ci, pour m’emmener avec lui. L’heure est passée. Il n’est pas là23.

Non so più. Non so più se l’ho visto, il soldato blu, oppure sognato. Il mio bel soldato dal casco blu e dall’accento straniero. L’accento spiccato del Nord, del Dakota. Lo sento ancora mentre mi dice che sarebbe tornato, proprio adesso, per portarmi con sé. L’ora è trascorsa. Lui non c’è.24

3.Traduction du rythme

L’ambiguïté de la relation entre les deux femmes, marquée par la double définition de Madame et Tantie, avec laquelle Vido appelle alternativement sa maîtresse, a été maintenue avec Signora et Mamì ; ce dernier néologisme a permis de garder la double syllabation du texte source, rythmée sur des sons chantants qui rappellent la pièce dans une relation de fausse confiance, mal définie.

VIDO : Bonjour, Tantie. C’est le bonjour que je vous offre. Recevez-le comme on reçoit un bel adieu, avec chaleur et amitié. Bonjou.r
LA MÈRE : Je vous ai dit bonjour. Appliquez-vous. À la salle de bains il y a des taches saumâtres.25

VIDO: Buongiorno, Mamì. Le do il mio buongiorno. Lo accolga come si accoglie un bell’addio, con calore e amicizia. Buongiorno.
LA MADRE: Le ho già detto buongiorno. Si metta al lavoro adesso. Nel bagno ci sono macchie salmastre26.

La pratique de la traduction s’est fondée sur certains principes : l’esthétique de la répétition, le retour du passé qui produit un rythme d’attente, la construction sur des séquences parallèles, les schémas de combinaison des registres qui sont des moyens d’explorer la langue, le principe de popularisation et de métaphorisation selon l’analyse de Bermann27.

La répétition produit un rythme que Meschonnic définit comme «l’organisation des marques par lesquelles les signifiants linguistiques et extralinguistiques […] produisent une sémantique spécifique (la signifiance) distincte du sens lexical»28.

Le mot fait vibrer de nombreuses cordes de la voix humaine à travers celles de deux femmes qui se retrouvent à l’aube pour une confession implacable, à l’extrême limite et dans laquelle elles sont victimes et bourreaux de l’autre, à tour de rôle.

Une danse macabre de la mort au rythme des mots qui pulsent jusqu’à l’explosion, et leur explosion est si forte qu’elle engendre le silence, une forme étrange de silence, une sorte de vide/plein. Vido ayant atteint le paroxysme de la souffrance, elle ne peut réagir que par son regard, un regard que l’autre ne peut plus soutenir : la responsabilité du traducteur était avant tout de capter la ‘géométrie musicaledes différents plans et de les assembler dans les corps-voix des actrices, Elaine Bonsangue et Marcella Parito, qui incarnaient les sons sur la scène de Catane.

4 Métaphorisation, personnification

Cette opération est d’abord l’espace de réinvention d’un jeu et du ‘plaisir du texte’29 : dans certains cas, la parole s’adapte à la force expressive du visage, pour ajouter un surplus de signifié que la langue cible ne peut conférer, comme dans le cas du mot errance : il s’atténue ou s’enrichit selon le choix du geste qui l’accompagne, un geste presque toujours violent même dans sa tendresse apparente. Dans le tissu du texte cible, le mot chacal a été préféré au mot coyote qui permet la personnification immédiate entre l’homme et l’animal, si forte et si présente dans la pièce, surtout au niveau des effets de cruauté : H Ho fatto un patto con gli sciacalli. I miei due figli lo sanno. Questo testimonieranno o fatto un patto con gli sciacalli. I miei due figli lo sanno. Questo testimonieranno.

LA MERE: J’ai pactisé avec les coyotes. Mes deux enfants le savent. Ils en témoigneront30.

LA MADRE: Ho fatto un patto con gli sciacalli. I miei due figli lo sanno. Questo testimonieranno31

Ho HoLa Mère : J’ai pactisé avec les coyotes. Mes deux enfants le savent. Ils en témoigneront. […] Q

5 Substitution implicante32

L’expression tête nue, si intense, avec une valeur mystique dans la langue source, une image évoquée par la mère dans un moment d’aveu sincère, a été rendue par tête rasée pour lier l’iconologie à son contexte historique de trahison, de violence et de punition, particulièrement évident dans la mise en scène de Catane :

Quant à mon fils. Mon fils. Il dira ce qu’on lui dit de dire. Il fera ce qu’on lui dit de faire. Il hurlera avce mes juges et sur ma tête nue, il jettera la première pierre.33

Quanto a mio figlio. Mio figlio. Ripeterà quello che gli diranno di ripetere. Farà quello che gli diranno di fare. Urlerà insieme ai miei accusatori e sul mio capo rasato scaglierà la prima pietra34.

Les choix ont été faits en tenant compte du contexte dans lequel la pièce était présentée, et en effet la chicorée, la boisson que la servante prépare pour les deux autres enfants, a été remplacée par de l‘orge pour harmoniser le registre linguistique avec l’horizon d’attente.

La Mère: les enfants vont se réveiller. Apportez la chicorée, le pain, un couteau, du sucre, du sucre roux, le beurre,. Il faut toujours demander, tous les matins35.

La Madre: I ragazzi stanno per svegliarsi. Porti l’orzo, il pane, un coltello, lo zucchero, zucchero di canna, burro. Bisogna sempre chiedere, tutte le mattine36.

Le mot a été coulé dans le scénario imaginé avec le réalisateur, un scénario de bunker sans issue, un lieu de survie, entouré d’énormes affiches (sortes de parchemins de la loi des icônes antiques) avec les noms des déportés des camps de concentration. Des noms de morts qui résonnent dans un silence assourdissant dans le vide apparent qui fige l’espace dans lequel sont plongées les deux femmes, dont l’une, la marâtre, apparaît comme une sorte de collaboratrice et l’autre, la fille adoptive, une juive sauvée lors d’une nuit de rafles.

6 Ajout: effets scéniques et responsabilités du metteur en scène

Le mot est l’ancre qui relie les personnages à la terre promise et déjà perdue, celle de leur propre enfance, une voix silencieuse qui reste latente et qui a été portée sur scène selon le principe de la «métaphorisation imageante»37 avec la présence muette d’une jeune fille qui, tout au long de la pièce, dessine, efface, redessine, jette le papier, se déplace le long de parcours géométriques prédéfinis. Une présence seulement fantômatique dans le texte-source, trop forte pour être simplement évoquée ; un personnage qui n’a pas été conçu par l’auteur mais que la mise en scène italienne, à notre avis, imposait. Le temps de la mémoire est l’espace du salut, mais la parole dans le corps de cette petite fille se tait parce qu’elle doit témoigner de la perte, de la lacération, du manque de bénédiction :

Le «complexe de Thénardier» existe.
On a pu le rencontrer au cours du siècle dernier, dans l’Europe occupée, au
Rwanda, dans l’ex-Yougoslavie,…
Et chez moi, dans la maison de mon enfance38.

L’importance du geste de la bénédiction, souligné à plusieurs reprises par l’auteur béninois, relie l’espace de la scène à celui du contexte culturel africain. Son manque annonce l’évolution incontournable et progressive d’une tragédie.

Conclusion

L’impératif ici, c’est la scène, la conjonction de l’espace et du mouvement. Du coup, la traduction ne peut plus se contenter de donner à comprendre. Elle doit aussi- et je dirais même avant tout- donner à voir et à entendre. Au théâtre, en effet, la langue vaut tout autant par la musique et la gestique que par le sens qu’elle recèle. Sur scène, les mots résonnent, ils miment. Ils sollicitent l’imaginaire, les sensations, le rêve plus encore que l’intelligence39.

L’oralité prend le dessus, le geste et l’expression deviennent les lieux de la communication, surtout du silence, un silence plein de signes: le traducteur peut accomplir sa tâche seulement dans la rencontre avec l’autre, avec le metteur en scène, les acteurs, les musiciens, le public… dans l’‘humanité commune’,

La réalisation du Complexe de Thénardier a été un laboratoire fondamental pour expérimenter l’accueil, l’hospitalité de la parole de l’autre, des émotions et des perceptions différentes que le texte suscitait : un lien de réciprocité sur un plan d’égalité. L’ombre latente et le rythme de la langue fon, si bien évoqués par José Pliya lors de nos rencontres, ont été reconstitués dans le texte d’arrivée : par la restitution d’un style paratactique, saccadé et sans connecteurs, par l’effort de donner la juste place à l’ ‘oralité’ de l’écriture, par la mise en valeur du geste, par la contamination de différentes cultures.

Le fil rouge qui part de Berman et arrive à Diagne indique le parcours étique et poétique du sens profond de la traduction.


1 S. BACHIR DIAGNE, De langue à langue. L’hospitalité de la traduction, Paris, Albin Michel, 2022.

2 Le texte est publié chez l’éditeur Seuil en 1999.

3 Cf. C. RIZZO, Mito e rappresentazioni dell’ospitalità: i modelli antichi nelle rielaborazioni moderne, in «Studi comparatistici», n. 27, 2022, pp. 45-72.

4 S. Bachir Diagne, De langue à langue. L’hospitalité de la traduction, cit. p. 14.

5 Cette approche a été déjà abordée dans d’autres études : José Pliya e la scena teatrale africana contemporanea: dall’ infanzia all’errance, « Studi comparatistici », n. 26, 2021, pp. 253-257. Dans cette contribution on entend souligner la conception théorique de la traduction ‘hospitalière’ face à la praxis d’un texte carrefour de cultures et de civilisations, comme Le complexe de Thénardier.

6 J. THIÉRIOT, Traduire, adapter, écrire, in Sixièmes assises de la traduction littéraire, Arles, Actes Sud, 1989, p.15.

7 Cf. le texte de S. BERARD, Le théâtre-Monde de José Pliya, Paris, Champion, 2015.

8A. HUANNOU, La littérature béninoise de langue française, Paris, Karthale, 1984.

9 La langue fon, une langue tonale, qui représente la toile de fond de la pièce était la langue officielle de l’ancien royaume du Dahomey, situé dans la partie sud de l’actuel Bénin. Cf. D. FADAÏROParlons fon : langue et culture du Bénin, Paris/Budapest/Torino, L’Harmattan, 2001.

10 «Mon drame est total car l’AUTEUR de KONDO le REQUIN, c’est mon père. Pour que mon œuvre prenne vie il me fallait tuer celle de mon père. Crime abominable mais indispensable» (J. PLIYA, Konda le roquet, Paris, L’Harmattan, 1997, p. 99).

11 «Pendant longtemps les dramaturgies africaines ont travaillé à la reconstruction nécessaire d’une identité et d’une estime de soi que des siècles d’aliénation avaient bafouée et les théâtres d’alors, à travers les pièces de Jean Pliya au Bénin, de Massan Maka Diabaté au Sénégal, de Seydou Badian au Mali, de Bernard Dadié en Côte d’Ivoire et bien d’autres, ont construit dans les années ’60-70 une mythologie historique de grandes figures héroïques africaines. Puis la désillusion des indépendances a ramené à l’introspection, à l’autocritique, au questionnement intérieur et au repli sur soi. Les dramaturgies africaines francophones se sont enfermées dans des problématiques purement africaines, dénonçant les dictatures, la perversion des mœurs, la responsabilité terrible de l’échec. Mais les dramaturges d’aujourd’hui veulent assumer les échecs de l’Afrique comme des échecs humains et non comme des failles africaines, ils lèvent le voile de la culpabilité et du fatalisme colonial, qui fait de l’Africain un éternel enfant, pour s’appuyer sur un point de vue qui engage l’humanité entière. Ils mettent ainsi les violences en perspective» (S. CHALAYE, Des dramaturgies qui se pensent au monde, in ‚Africultures‘ n° 54, janvier-mars 2003, p. 41).

12 José Pliya a été directeur de la Scène nationale de l’Artchipel en Guadeloupe. Il a fondé l’association Écritures théâtrales contemporaines en Caraïbe en Martinique pour soutenir et promouvoir la dramaturgie contemporaine et surtout valoriser les écritures théâtrales caribéennes. Il a dirigé aussi la Compagnie nationale de création à Marseille.

13 J. PLIYA, Le complexe de Thénardier, Paris, L’avant-scène, théâtre, 2001

14 M. QUENUM, Au Pays des Fons. Us et Coutumes du Dahomey, Paris, Maisonneuve et Larose, 1999 ; A. Bienvenu AkohaSyntaxe et lexicologie du fon-gbe, Bénin, Paris, L’Harmattan, 2010.

15J. PLIYA, Le complexe de Thénardier, cit., p. 17.

16 Vido (Vidomingon) «enfant placé», constitue un fléau de la société africaine, c’est-à-dire mettre au service des familles aisées des fillettes que leurs familles d’origine ne sont pas en condition de nourrir à cause de la pauvreté. Un phénomène endémique que le gouvernement tente de combattre, à tel point qu’on le retrouve sur le site de Marcel Gbaguidi, dans le programme gouvernemental, dans le secteur Éducation au point 56 : «Éradication du phénomène des enfants placés (VIDOMINGON), conséquence de la pauvreté». Cfr. http://www.marcelgbaguidi.com.

17J. PLIYA, Le complexe de Thénardier, cit., p. 47-48.

18 Idem, p. 21.

19 Lors de la rencontre que Pliya a eue avec le public de Catane, après la représentation du Complexe de Thénardier le 1er avril 2004 (mise en scène de Salvo Gennuso, avec Elaine Bonsanguet et Marcella Parito) dans la Chapelle Bonaiuto, il a expliqué que la notion de bénédiction est décisive pour son peuple ; partir sans avoir obtenu l’imposition des mains de l’un des parents, c’est un présage de malheur. C’est pourquoi Vido essaie par tous les moyens d’obtenir ce geste et fait semblant que rien ne se passe jusqu’au bout, au point de se dire qu’elle n’a pas compris le geste suicidaire de la mère-marâtre. Vido dit que madame s’est endormie. En niant le suicide comme un geste extrême, elle nie même la malédiction qui règne sur son destin.

20 J. PLIYA, Le complexe de Thénardier, cit., p. 46.

21 S. BECKETT, Fin de partie, Paris, Ed. de Minuit, 1957, p.106.

22 Comme le souligne Maria Tenchea : «L’explicitation consiste à introduire dans le texte d’arrivée des éléments dont le correspondant n’est pas présent dans le texte de départ» (Explicitation et Implicitation dans l’opération traduisante, in Traductologie, Linguistique et Traduction, Etudes réunies par Michel Ballard et Ahmed El Kaladi, Artois, Presses Universitaires, 2003, p. 110).

23 J. PLIYA, Le complexe de Thénardier, cit., p.13.

24 J. Pliya, Il complesso di Thénardier, dans Teatro: Testi e traduzioni con inediti, dir. par Cettina Rizzo, Firenze, Olschki, 2007, p.195. Les citations de la traduction italienne se rapportent à cette édition.

25 J. PLIYA, Le complexe de Thénardier, cit., p.13.

26 J. Pliya, Il complesso di Thénardier, dans Teatro: Testi e traduzioni con inediti, cit., p. 196.

27 A. BERMANN, La Mise en relief, ‚Palimpseste‘, n. 5, Paris, Sorbonne nouvelle, 1991.

28 H. MESCHONNIC, Critique du rythme, Lagrasse, Verdier, 1982, p.216.

29 „Ce n’est pas la ‚personne‘ de l’autre qui est nécessaire, c’est l’espace : la possibilité d’une dialectique du désir, d’une prévision de la jouissance : que les jeux ne soient pas faits, qu’il y ait un jeu“, (R. BARTHES, Le Plaisir du texte, Paris, Seuil, 1973, p.9-10).

30 J. PLIYA, Le complexe de Thénardier, cit., p. 43.

31 J. Pliya, Il complesso di Thénardier, dans Teatro : Testi e traduzioni con inediti, cit., p.211.

32 Selon les études de Maria Tencha

33 J. PLIYA, Le complexe de Thénardier, cit., p. 43.

34 J. Pliya, Il complesso di Thénardier, dans Teatro : Testi e traduzioni con inediti, cit., p.211.

35 J. PLIYA, Le complexe de Thénardier, cit., p. 15.

36 J. Pliya, Il complesso di Thénardier, dans Teatro : Testi e traduzioni con inediti, cit., p. 197.

37 A. BERMANN, La Mise en relief, cit., p.15.

38 J. PLIYA, Le complexe de Thénardier, cit., p. 10.

39 J. THIÉRIOT, Traduire, adapter, écrire, in Sixièmes assises de la traduction littéraire, cit. p. 15.